Les femmes africaines derrière l’écran
D’après le rapport du CNC publié en mars 2021, sur les 355 réalisateurs de courts-métrages en 2019, 138 étaient des femmes. Notons que la part des réalisatrices progresse sur la période 2010-2019, passant de 28,8% en 2010 à 38,9 % en 2019. Ces dernières années des évolutions ont pu être observées en matière de visibilité des femmes dans l’industrie cinématographique.
Cependant, qu’elles soient cheffes opératrices son, scénaristes, réalisatrices, les techniciennes de cinéma africaines peinent encore aujourd’hui à faire entendre leur voix dans un milieu historiquement masculin. Entre les préjugés sexistes, le manque de financements et le manque d’accompagnement, beaucoup de réalisatrices sont dissuadées voire empêchées de mener à bien leurs projets.
Tam Tam à Paris est le premier documentaire réalisé par une femme camerounaise en 1963. Pilote, réalisatrice mais aussi journaliste, Thérèse Sita-Bella marquera durablement son époque. Son film est présenté à la première semaine du cinéma africain (qui deviendra par la suite le FESPACO). Mais ce ne sont que dans les années 2000 que furent créés des festivals (le Festival international du Film de Femme de Salé au Maroc en 2004 et le Mis Me Binga au Cameroun en 2009) célébrant les films réalisés par des femmes. Émergèrent alors des réalisatrices telles que Jemima Catraye et Christiane Chabi Kao du Bénin, Monique Mbeka Phoba de la République Démocratique du Congo, Fanta Regina Nacro du Burkina Faso…
Des évolutions significatives au sein des festivals internationaux
Notons qu’en 2014, Ava Duvernay devient la première réalisatrice afro à être nominée aux Golden Globes dans la catégorie « meilleure réalisation » pour Selma. En France, dans le cadre du festival de Cannes, les choses évoluent depuis peu. En 2019, on perçoit un changement notable dans la visibilité des femmes noires au cinéma, notamment avec la réalisatrice franco-sénégalaise Mati Diop. Fille du musicien de renom Wasis Diop et nièce de Djibril Diop Mambety, elle réalise son premier long-métrage en 2018 : Atlantique. Il obtient le Grand Prix du festival de Cannes 2019, une première pour réalisatrice africaine. En 2020, elle est nominée au César du meilleur premier film.
Cette même année 2019 à Cannes, le film Adam est projeté dans la sélection un certain regard. La réalisatrice Maryam Touzani dit avoir « besoin de donner la parole aux femmes invisibles » : son personnage principale est une mère célibataire qui souhaite faire adopter son nouveau-né pour qu’il trouve une place dans la société. Le message va donc bien au-delà du film : il s’agit avant tout de réaffirmer la place des réalisatrices dans le paysage audiovisuel.
La 26ème édition du festival panafricain du cinéma et de la télévision (le Fespaco) s’inscrit dans la même dynamique où un Etalon d’or de Yennenga a été remis à la réalisatrice Chloé Aïcha Boro, pour son documentaire, Le Loup de Balolé. Cette remise de prix fut l’occasion d’inaugurer le mouvement « Nous sommes Yennenga » engagé par l’artiste sénégalaise Fatou Kandé Senghor. Un grand pas pour la visibilité des techniciennes de cinéma africaines !
Patricia Kwende est également dans cette dynamique dans son dernier film L’Enfant de l’autre (n’est pas ton esclave). Elle y dénonce la violence intra familiale à travers ce conte fantastique, ou deux jeunes filles nous conduisent à découvrir combien les blessures non guéries nous façonnent. Vous pouvez découvrir le film en ligne. https://vimeo.com/545045643
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